Botswana : Quett Masire, un président discret pour inspirer l’Afrique
C’est un titre accrocheur que choisit la revue britannique African Arguments pour célébrer la mémoire de l’ancien président du Botswana décédé le 23 juin à l’âge de 91 ans, et dont les funérailles ont eu lieu ce mercredi 28 juin : « Quett Masire, le grand leader africain dont vous n’avez jamais entendu parler. »
Moins célèbre que ses voisins et contemporains Nelson Mandela ou Robert Mugabe, moins populaire à travers le continent que les Nkrumah, Lumumba et autre Sankara, Ketumale Joni Masire, dit Quett Masire, deuxième président du Botswana (1980-1998), n’en demeure pas moins une source d’inspiration, bien au-delà des frontières de son pays. Et en premier lieu, une référence en matière de gouvernance. Il n’est pas rare de voir invoqué le « miracle botswanais » pour qualifier la prospérité de ce petit pays de près de 2,5 millions d’habitants bordé par l’Afrique du Sud, le Zimbabwe et la Namibie, et qui a su accumuler les performances. Croissance économique soutenue et durable (6,6 % de hausse du PIB entre 1980 et 2010), faible corruption (le Botswana est classé 35e sur 176 pays selon l’index de perception de la corruption de Transparency International), taux d’alphabétisation et espérance de vie bien plus élevés que la moyenne africaine, redistribution effective des richesses issues de l’exploitation du diamant, dont le Botswana est le premier producteur africain et le deuxième producteur mondial… Ce pays, pauvre à l’indépendance en 1966, est devenu le symbole d’une réussite, dont Quett Masire fut, assurément, l’un des artisans.
Une pluie d’hommages à travers l’Afrique
FARE THEE WELL OUR FATHER..until we meet again #RIPMasire pic.twitter.com/8Ih7RRzoBq
— Botswana Government (@BWGovernment) 29 juin 2017
« Homme de principe et d’engagement », qui a incarné « les valeurs de travail et d’intégrité », selon l’ancien dirigeant nigérian Olusogun Obasanjo, ou « excellent exemple à imiter dans le reste de l’Afrique », pour le chef de l’État kenyan Uhuru Kenyatta, Masire semble compter peu de contempteurs sur le continent. Le président zimbabwéen Robert Mugabe a encore salué le dirigeant « vertueux et humble », quand son homologue angolais José Eduardo dos Santos s’est, lui, dit « consterné » par sa disparition.
Mbeki: Masire’s leadership ‘made us proud to call ourselves Africans’https://t.co/5x2rymAmt7 pic.twitter.com/gjVbRsh0Cn
— News24 (@News24) 29 juin 2017
À l’heure du dernier hommage, le 28 juin, à Kanye, village natal de Masire, celui de Thabo Mbeki était particulièrement appuyé. Aux côtés de Robert Mugabe, du roi du Lesotho Letsie III et d’anciens chefs d’État d’Afrique australe, l’ex-président sud-africain a souligné la richesse de son héritage. Quett Masire fut, a-t-il rappelé, « l’un des principaux architectes de ce Botswana démocratique qui s’est extrait de la malédiction d’être l’un des pays les plus pauvres du monde », un bâtisseur « de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SACD) » et « un combattant de première ligne pour la libération totale du colonialisme et de la domination des minorités blanches en Afrique ».
La terre et la politique
Quett Masire se décrivait comme « un fermier attiré par la politique ». Né en 1925, il est gardien de troupeau durant son enfance. Après ses études secondaires, il devient enseignant, puis investit dans une ferme agricole, qu’il veut moderne. Cofondateur en 1961 du Botswana Democratic Party (BDP), il devient vice-président du pays lors de l’indépendance en 1966 et de l’accession au pouvoir de Seretse Khama. Les « barons du bétail » prenaient alors le pouvoir, explique The Daily News, en allusion à leurs origines paysannes. Le quotidien botswanais rappelle surtout l’importance de l’élevage et de l’agriculture dans l’économie du pays. Des secteurs que ces dirigeants postcoloniaux ont cherché à encadrer, à moderniser et à dynamiser. C’est sous la présidence de Masire, en 1991, qu’est adoptée la Politique nationale pour le développement de l’agriculture, « qui est encore aujourd’hui perçue comme pertinente », selon The Daily News. L’homme, ajoute le quotidien de Gaborone, avait « une passion pour l’agriculture ». « C’était un bourreau de travail, obsédé par l’agriculture et le production alimentaire », renchérit l’ancien président Festus Mogae, qui a travaillé une vingtaine d’années à ses côtés avant de diriger à son tour le Botswana en 1998.
Three reasons why Quett Masire should be remembered as one of Africa’s greatest post-colonial leaders https://t.co/gjMsUOkhH4
— Africa@LSE (@AfricaAtLSE) 29 juin 2017
Source : http://afrique.lepoint.fr
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